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Emmanuel Delmas (Blog du Sommelier) : « un vin ne ment jamais… »

Emmanuel Delmas a tout du profil de « celui qui est tombé dedans quand il était petit ». Et pourtant… il n’a pas évolué dans le milieu vinicole dès son plus jeune âge.

C’est aux côtés des artisans de la vigne qu’il a appris à connaitre et à reconnaitre ce qui fait un bon vin. Sommelier de métier depuis 20 ans, il a mûri cette passion au gré de rencontres incroyables, jusqu’à mettre son cœur et son âme au service des vignerons toutes régions confondues. Formations, dégustations, conférences, écriture (livres, le Figaro-vin etc.) et depuis 2005 le Blog du Sommelier, Emmanuel Delmas s’est forgé une solide réputation dans le vin et s’attache à le rendre accessible au plus grand nombre.
Avec lui, pas la peine d’avoir une grosse bourse pour se faire plaisir. Les bonnes bouteilles se trouvent généralement du côté des petits producteurs passionnés comme lui. Rencontre avec cet ambassadeur de la vigne…

Comment est née cette passion pour le vin ? Quel est votre plus ancien souvenir gustatif en lien avec le vin ?

Je n’ai pas reçu d’éducation particulière au vin. J’ai même commencé très tard. Dans le cadre de la préparation de mon BEP cuisine à l’école hôtelière, j’avais 1 heure de cours d’œnologie. La matière où j’avais les meilleures notes… Diplômé il y a maintenant 20 ans, j’ai été commis sommelier puis sommelier, dans de magnifiques maisons (Hôtel Vernet, Guy Savoy, la Tour d’Argent, le Rosalp à Verbier, le Gavroche à Londres, Alain Ducasse au Plaza Athénée, Lasserre, et le Fouquets Barrière). Les rencontres avec les personnes de ce métier passionnant et les vignerons ont fait le reste. Je n’ai pas de souvenir gustatif lointain en lien avec le vin, mais j’ai une sensibilité par rapport aux produits. J’évite d’acheter les produits frais dans les grandes surfaces. Je favorise au contraire, les primeurs et les professionnels dotés d’un savoir-faire artisanal. Au même titre que les produits frais, le vin se mâche. Pour capter la matrice du vin, il faut faire rencontrer la salive et le vin. Si vous ne le mâchez pas, un vin n’aura aucun goût.

Comment attirer votre attention lorsqu’on est vigneron ? Sur quels critères sélectionnez-vous les producteurs que vous référencez ?

Faire du bon vin c’est tout ! En fait je ne travaille pas avec autant de vignerons que çà, bien que je sois beaucoup sollicité ; ils sont entre 20 et 30 que j’aime bien. Quand je me rends sur une appellation, je sais ou je vais, je me renseigne en amont de ma visite. Un vin ne ment jamais, c’est un livre ouvert. Il raconte des choses, il faut savoir les capter. En le dégustant vous savez si le vigneron est un bosseur ou pas… A travers l’émotion et le plaisir qu’il procure, on peut rapidement déterminer ceux qui travaillent plus que les autres. Le vin se nourrit de tout l’environnement qui l’entoure : le travail de la vigne bien sûr mais aussi le terroir, le climat etc. On doit retrouver tous ces critères à la dégustation. Je m’intéresse beaucoup aux jeunes vignerons prometteurs, le plus souvent recommandés par d’autres vignerons aguerris.

Avez-vous des régions vinicoles de prédilection ?

Aucune ! Etant parisien, je n’ai pas de vignobles de prédilection. Mes préférences vont vers les vins (et les vignerons qui vont avec…) de tous horizons.

Vous arrive-t-il de faire un repas sans vin ? Si oui, pour quelle(s) autre(s) boisson(s) optez-vous ?

J’aime trop le vin pour le gâcher pour rien. Je n’en bois donc pas au quotidien. Je reste parfois une, voire plusieurs semaines sans en boire une goutte. Je ne bois également jamais d’apéritif ni aucun cocktail. Adepte de l’eau et du thé dans la journée, je préserve tout le plaisir de la dégustation quand elle se présente ! D’autre part le vin c’est de l’alcool, il faut donc faire attention et s’imposer une discipline. Quand je goûte un vin, je le bois pour ce qu’il est, c’est-à-dire tout seul… Bien entendu, entre amis, nous aimons organiser des soirées dégustations et dans ce cas nous apprécions de découvrir plusieurs bouteilles accompagnées de fromages ou de rillettes artisanales. Au restaurant j’ai aussi pour habitude de décider du plat après le choix du vin.

Quels conseils donneriez-vous à un jeune restaurateur qui s’installe et qui n’a pas les moyens de proposer une carte de vins très élaborée au démarrage de son établissement?

Le vin coûte cher. Je recommande donc à un jeune restaurateur de se faire accompagner et de ne pas hésiter à utiliser une partie de son budget formation pour former son personnel au service du vin. Pour débuter, je préconise 30 à 35 références de vins maximum, qui défendent les valeurs de la cuisine. Des vins régionaux en priorité puis quelques Bordeaux et Bourgogne par exemple. De la même façon qu’un chef de cuisine connait les produits qu’il va mettre en avant sur sa carte, le responsable de salle doit être attentif aux choix des vignerons. Il faut à tout prix éviter de s’approvisionner chez les grossistes pour les professionnels de la restauration, sous peine de se retrouver avec la même carte des vins que tout le monde ! Proposer des vins à l’ardoise est judicieux mais en complément d’une carte des vins traditionnelle. Il faut un support papier pour la clientèle. Enfin, un restaurateur ne doit pas hésiter à aller à la rencontre des vignerons, visiter les vignes et les domaines vinicoles pour apprendre. Etre guidé par des professionnels est essentiel !

A l’approche des fêtes, quelles sont vos préconisations en matière de champagne ou de vins « à bulles » ?

Comme pour tous les vins, ce n’est pas le prix du champagne qui parle, mais sa qualité. Le défi à relever ? Chercher « l’autre champagne »… On trouve de belles références parmi les vins pétillants de Vouvray ou de Montlouis sur Loire au prix de 12 ou 13 euros la bouteille. Un Gaillac méthode ancestrale ou encore des bulles typiquement montagnardes comme les Perles du Mont Blanc (Ayse) procureront autant de plaisir (voir plus), qu’un champagne classique.

Quel(s) vin(s) pour un repas de fêtes « petit budget » ?

Au risque de me répéter, il faut chercher les petites appellations, être curieux et à l’affût du « bon faiseur » de vin. Un Chinon, un Bourgueil, un Gaillac ou encore un Bergerac pour un budget de 7 ou 8 euros la bouteille feront le bonheur de vos invités. A partir du moment où le vin dégage quelque chose, le repas de fêtes sera une réussite !

Propos recueillis par Annie Mitault – Tables & Auberges de France

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