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Victor Gayet, créateur des velours de vinaigre à la Vinaigrerie de l’Abbaye (Cluny) : « Je recherche des concentrations aromatiques qui ont un sens avant tout ! »

Sauces, marinades, réductions… Ce grand basique de la cuisine s’utilise dans de nombreuses recettes et pas seulement dans les vinaigrettes… Le vinaigre (comprenez vin-aigre !) réserve de belles surprises tant sur le plan gustatif que pour la santé. Très certainement né d’un accident de fermentation, et déjà utilisé 5000 ans avant J-C. en guise d’aliment ou de médicament, ce précieux condiment est un incontournable de la gastronomie. Encore faut-il faire la différence entre tous les vinaigres selon leur origine et leur méthode de fabrication.

A la Vinaigrerie de l’Abbaye de Cluny (71), recommandée par Tables & Auberges en France, on laisse le temps et la nature faire son œuvre pour produire une gamme de vinaigres aux saveurs variées tout en valorisant les produits du terroir. Victor Gayet, ingénieur en agriculture et agroalimentaire, nous parle de son métier qui requiert beaucoup de patience et un vrai savoir-faire : « J’ai démarré seul en 2014 à mon retour du Québec. Aujourd’hui nous sommes 3 personnes à la Vinaigrerie de l’Abbaye. Plusieurs années ont été nécessaires pour arriver à la vente de notre vinaigre de cidre intégralement réalisé en fût de chêne et vieilli pendant 12 mois. Nous respectons les étapes naturelles d’une méthode d’acétification ancestrale. Chez nous, il n’y a pas de chauffage, ni d’oxygénation ». Il faut en effet 1 an, voire 1 et demi pour la fermentation du jus de pomme d’abord transformé en cidre. C’est la transformation de l’alcool en jus acétique au contact de l’air qui conduit à la fabrication du vinaigre. Ainsi, il faut une année pour la transformation d’un tonneau de 100 litres.

On recense une dizaine d’artisans vinaigriers en France qui utilise la fermentation naturelle, dont 3 ou 4 spécialisés dans le vinaigre de cidre. Au fil des années, Victor Gayet a développé une gamme de vinaigres et surtout de « velours de vinaigres » uniques aux saveurs variées. A l’image de célèbres erreurs culinaires, qui ont engendré de grandes recettes, le velours de vinaigre est né d’un accident de plancha : « Un jour en faisant une plancha, j’ai déglacé des steaks avec du vinaigre au cassis. J’ai laissé tomber la bouteille dans la plancha ! A force de réduire, il est resté une sauce extraordinaire. C’est ce que j’ai voulu reproduire dans les velours… En développant cette gamme, je recherche des concentrations aromatiques qui ont un sens avant tout. On essaie de suivre la saisonnalité des produits, le plus possible en bio et surtout issus de productions locales françaises. Les velours sont élaborés avec des ingrédients sains et naturels ; des fruits et des aromates que l’on fait réduire dans des chaudrons en cuivre. Ici nous n’utilisons pas d’arôme artificiel, pas de colorant ni de conservateurs… Avant de me lancer dans une recette, je demande beaucoup autour de moi ce qui plait ; je m’interroge également sur ce qui pourrait aider les chefs pour accompagner leurs préparations gastronomiques. Ainsi, Le velours chocolat gingembre donne une expérience gustative exceptionnelle : l’acidité du gingembre et du vinaigre associée à la douceur du chocolat valoriseront de l’agneau, de l’époisses ou du camembert. On peut y faire mariner un filet mignon de porc avant de le cuire à la plancha. Cela donnera une viande tendre au goût évolué. Mon velours préféré ? Le velours orange pain d’épices qui va sublimer un foie gras ou un magret mais aussi une salade d’endive, du melon et du jambon cru, une tranche de Comté ou tout simplement un yaourt ».

Victor Gayet n’entend pas s’arrêter là. Curieux et gourmand à la fois, il entend faire connaitre ses produits au plus grand nombre, tout en restant dans un mode de production artisanal : «Nous avons ouvert un magasin juste en face de l’Abbaye de Cluny à la fois pour faire connaitre nos produits mais aussi pour que le public puisse les déguster. On explique aux gens comment on travaille pour qu’ils s’imprègnent de notre démarche. Nous prévoyons prochainement d’accueillir des groupes avec un chef pour organiser des dégustation plus élaborées en fonction des saisons (foie gras l’hiver, salades et plancha l’été etc.). La dégustation est primordiale à mes yeux. Ce métier me passionne mais ce n’est pas suffisant. Il faut que nos produits soient excellents. Je veux entendre les gens faire « whaou » à la dégustation ! ».

Propos recueillis par Annie Mitault