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Xabi et Patrice Ibarboure, quand l’héritage culinaire et la passion du métier ne font plus qu’un…

« Quand les gens viennent manger chez nous, nous leur ouvrons notre maison et notre cœur… ». Car assurément, c’est bien de cœur qu’il s’agit chez les frères Ibarboure où l’art du bien recevoir est une vocation familiale. Au-delà de cette touchante histoire de famille et de transmission, qui met en scène trois générations, Xabi et Patrice sont parvenus à imposer leurs prénoms et leurs talents à travers une cuisine qui fait la part belle aux produits du Pays Basque. Une cuisine inspirée par leur père et leur grand-père, qu’ils revisitent avec modernité et créativité. Rencontre avec Xabi Ibarboure, un grand professionnel qui a découvert (tout comme son frère Patrice) la beauté du métier en trainant devant les fourneaux du paternel…

Vous avez baigné toute votre enfance dans la cuisine et les métiers de bouche. Racontez-nous votre plus ancien souvenir gustatif…

C’est plutôt un moment… un moment de notre enfance… Notre famille avait l’habitude de se réunir deux fois par an autour d’un repas à l’Hôtel Briketenia chez nos grands-parents. Le restaurant était fermé. Nos parents, nos oncles et nos tantes étaient alors détendus. Avec nos cousins, nous profitions d’être ensemble pour jouer dans tout l’hôtel. Notre grand-père Michel nous préparait des pommes dauphines délicieuses et un gâteau basque… de précieux souvenirs gravés dans notre mémoire… D’ailleurs ce gâteau basque, dont nous avons retravaillé la recette, est proposé au petit-déjeuner de notre établissement.

Lequel de vous deux est le plus gourmand ?

Je suis le plus gourmand ! C’est moi le plus costaud des deux !

A quel moment avez-vous décidé de poursuivre l’aventure familiale derrière les fourneaux ? Comment votre papa, le chef Philippe, a-t-il influencé votre façon d’appréhender ce métier ?

Même si nous avons baigné toute notre enfance dans la restauration, çà n’était pas forcément notre vocation première. Si nous avons été influencés, c’est de façon indirecte. Lors du déjeuner (nous étions 8 à table), notre famille ne parlait jamais en mal de ce métier, abordant avec nous toujours les bonnes facettes et le côté valorisant de la profession, jamais les contraintes. On savait nos parents passionnés. Je me souviens de mon père qui chantait et sifflotait en cuisine pendant qu’il préparait ses sauces. Après m’être éloigné du nid familial lors de mon internat chez les prêtres, le choix de faire l’école hôtelière a été une évidence. Cela coulait de source. J’ai passé mon BAC et mon BTS cuisine au Lycée Hôtelier de Biarritz. Mon frère Patrice m’a vu rentrer dans la cuisine. A l’époque il ne savait pas trop quelle voie choisir. Comme il était patient, minutieux et très perfectionniste, il a voulu s’essayer à la pâtisserie. Son côté artistique est vite ressorti.

Vous avez fait vos armes chez les plus grands. Lequel (lesquels) d’entre eux considérez-vous comme votre (vos) mentor(s) ?

Avec mon frère Patrice nous avons travaillé dans de grandes maisons, mais je dirai que l’on n’a pas vraiment de mentor, hormis bien sûr notre père le chef Philippe. Tout au long de notre parcours professionnel, nous avons « pioché » ce qu’il y avait à « piocher ». J’ai appris la rigueur au quotidien avec Yannick Allano ; également le côté tradition avec Jean-Michel Lorain à Joigny. Il m’a initié aux recettes de son père modernisées et revisitées, en apportant quelques touches asiatiques. J’ai également découvert le terroir méditerranéen avec les Frères Pourcel. Patrice a appris à travailler le sucre et développer le côté entreprise lors de son passage chez de grands professionnels comme Pierre Gagnaire ou Daniel Boulud à New York.

Les produits du Pays Basque occupent une place de choix sur votre carte. Quels sont vos produits de prédilection ? Comment sélectionnez-vous vos fournisseurs ou producteurs locaux ?

Ce sont les saisons qui rythment nos cartes et nos menus et nous sommes en perpétuelle recherche de bons produits. La qualité avant tout. Mais il est vrai que nous sommes très attachés aux produits de la région. Nous avons la chance de pourvoir compter sur des producteurs et fournisseurs locaux exceptionnels. Notre cochon « Kintoa » vient de chez Pierre Oteiza et de chez Eric Ospital. Nous cuisinons l’agneau de lait des Pyrénées. Nous travaillons en direct avec les pêcheurs du coin : saumon de l’Adour, truite de Banka, ombrines, maigres etc. En plus de la carte habituelle, c’est notre pêcheur Christophe qui nous permet de faire de nouvelles suggestions selon l’arrivage du jour. Un matin, il va m’apporter deux poulpes, pêchés 2 heures plus tôt, et le lendemain tout autre chose…

Peut-on considérer que la fleur de courgette est le « plat signature » de la famille Ibarboure ? Racontez-nous son histoire…

Cela fait effectivement parti des plats « signature » de la maison. Mon grand-père Michel a découvert la fleur de courgette au Negresco où officiait Jacques Maximin. Dès son retour de Nice, il a décidé d’en produire dans le potager du restaurant. Enfants, nous ramassions tous les matins en été les fleurs de courgette plantées par notre grand-père. Aujourd’hui la tradition perdure : nous faisons les semis et les plantations nous-mêmes dans deux parcelles, l’une pour l’hôtel restaurant Briketenia de notre oncle et la deuxième pour la Table des Frères Ibarboure. De la même façon nous faisons pousser nos herbes aromatiques et nos jeunes pousses de légumes. Bien sûr les recettes à base de fleur de courgettes ont changé et évolué au fil des ans. La recette de notre père était à base de crabe Txangurro ou de fromage ; aujourd’hui nous servons les fleurs de courgettes avec une farce de langoustines.

Citez-nous un produit que vous n’aimez pas et que vous n’avez jamais cuisiné…

Je ne peux pas manger de poivron cru. Je le mange seulement lorsqu’il est bien cuisiné, voire confit. Par exemple nous proposons une tarte aux fraises et aux poivrons, juste magnifique. Vous ne me ferez pas manger une salade avec des morceaux de poivron cru dedans. C’est pareil pour l’oignon d’ailleurs !

Vous représentez la 3ème génération de cuisiniers de la famille Ibarboure. Comment parvenez-vous à innover en cuisine tout en conservant l’héritage culinaire ?

Bien entendu, on essaie de garder le goût des produits que notre père travaillait, tout en en apportant notre touche personnelle. Nous sommes également bien aidés par le matériel et les techniques qui ont évolué. Je pense au Tourteau façon Txangurro, une recette traditionnelle du Chef Philippe, à base de safran, armagnac, piment d’Espelette, ail etc. que nous avons allégée. Je suis très attaché à l’harmonie dans l’assiette formée par chaque élément. Les idées me viennent en travaillant les produits. Je fais des essais avec 2 ou 3 garnitures différentes, je goûte et je fais goûter.

Comment se passe les changements de carte ? Travaillez-vous en binôme sur les nouvelles créations ? Qui prend la décision finale ?

On travaille chacun de notre côté et ensuite on se fait goûter mutuellement (ainsi qu’à l’ensemble de l’équipe) les plats et les desserts. Ça nous permet d’avancer. Nous sommes très regardants sur la saisonnalité. On échange beaucoup sur nos créations respectives et on ne manque pas de se faire des suggestions lorsqu’un produit nous plait. Ainsi, si je vois de beaux produits au marché, comme les framboises en ce moment, j’en ramène à mon frère qui saura parfaitement les sublimer. Chacun décide de ses propres changements sur la carte.

Citez-nous votre accord fromage et vin préféré ?

J’ai eu le plaisir de déguster un fromage bleu de Roquefort accompagné d’un vieux Porto rouge à l’Hôtel Georges V à Paris, une alliance divine ! A la Table des Frères Ibarboure, nous avons l’habitude de proposer un plateau de fromages en grande majorité du Pays Basque, du Béarn et des Pyrénées à déguster avec une bière locale ou un vin de pomme.

Si demain je vous invite à déjeuner à la maison, quels sont les plats et/ou les desserts qui vous rendent heureux ?

Des choses simples et pas compliquées comme des pâtes par exemple. Je joue à la pelote basque et notamment des tournois en 1ére série pendant mes coupures de l’après-midi. J’ai donc besoin de sucres lents. Tout comme mon frère qui pratique la course à pied. J’adore aussi une salade que me prépare mon épouse à base de tomates, haricots verts, œufs durs avec des pommes de terre chaudes par-dessus. Patrice aime toujours autant le gâteau basque. Il apprécie également les glaces bien faîtes et pas trop sucrées.

Propos recueillis par Tables & Auberges

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